Tout savoir sur la Loi Travail dans l’HPA

Par Martine Barbier-Gourves 27/10/2016

Promulguée le 8 août dernier, la Loi Travail n’est pas sans incidence sur la gestion d’une entreprise de l’HPA. Durée de travail, contrats saisonniers, congés, santé au travail, licenciements, entre autres articles, ne sont que quelques-unes des points qui méritent attention. Nous vous proposons à travers ce dossier une première approche synthétique du texte en dix thèmes.

Promulguée le 8 août dernier, la Loi Travail n’est pas sans incidence sur la gestion d’une entreprise de l’HPA. Durée de travail, contrats saisonniers, congés, santé au travail, licenciements, entre autres articles, ne sont que quelques-unes des points qui méritent attention. Nous vous proposons à travers ce dossier une première approche synthétique du texte en dix thèmes.

Des décrets toujours en attente

Après un parcours d’adoption laborieux, la loi relative au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels a été promulguée le 8 août 2016.

La loi Travail pose le principe d’une réécriture en deux ans du code du Travail confiée à une commission d’experts et de praticiens des relations sociales. Mais d’ores et déjà, elle entame une réforme portant sur la durée du travail, les congés, les négociations collectives et l’articulation des normes, le licenciement économique, la formation professionnelle, la santé au travail, les institutions représentatives du personnel, les salariés détachés.

Même si la loi Travail est applicable dès sa promulgation, sauf certaines dispositions dont la date d’effet est prévue ultérieurement, il n’en demeure pas moins que de nombreux décrets sont encore en attente.

Pour vous permettre une première lecture synthétique du texte, nous avons sélectionné 10 mesures-clés susceptibles d’intéresser les gestionnaires de camping. Ce dossier sera complété ultérieurement par thème pour approfondir les incidences des nouvelles dispositions législatives sur la branche HPA.

1-La durée du travail

La durée légale du travail effectif reste fixée à 35 heures.

En matière de temps de travail, les accords d’entreprise priment désormais sur les conventions ou accords de branche (sauf exceptions prévues par la loi). Toutefois, en l’absence d’accord d’entreprise, c’est l’accord de branche qui s’applique. A défaut d’accord collectif (d’entreprise ou de branche), ce sont alors les dispositions légales qui trouvent à s’appliquer.

A titre d’exemple, la dérogation à la durée moyenne maximale hebdomadaire de travail pourra être fixée, par accord d’entreprise, à 46 heures sur 12 semaines consécutives (au lieu des 44 h prévues par la loi), alors que précédemment une telle possibilité nécessitait un accord de branche validé par un décret. Notons, que l’accord national du 23 mai 2000 étendu prévoit déjà cette dérogation pour la Branche HPA (validée par décret du 22 avril 2002).

De même, s’agissant des heures supplémentaires, l’accord d’entreprise peut directement fixer les taux de majoration applicables, sans pouvoir être inférieurs à 10 %, et prime désormais sur les dispositions de l’accord de branche. Ce n’est qu’à défaut d’accord collectif (d’entreprise ou de branche), que les taux de majoration légaux s’appliquent. L’avenant n°4 du 15 avril 2003 étendu prévoit, dans la branche HPA, des taux de majoration conventionnels pour heures supplémentaires, ainsi que les contingents annuels. Désormais, un accord collectif d’entreprise pourrait prévoir d’autres dispositions que celles définies dans l’accord de Branche.

Cette primauté de l’accord d’entreprise s’applique à d’autres dispositions, telles que le dépassement de la durée maximale quotidienne de travail, une dérogation à la durée minimale de repos quotidien, la détermination de la durée des pauses, la mise en place des astreintes, la possibilité d’aménager le temps de travail, etc.

IMPORTANT : Pour être valides, les accords d’entreprises devront être signés par une ou plusieurs organisations syndicales de salariés représentatives ayant recueilli plus de 50 % des suffrages exprimés (accords dits majoritaires). A défaut d’atteindre ce seuil, l’accord signé pourra être validé après organisation d’un référendum du personnel, selon les conditions définies par la loi. Par ailleurs, la loi Travail a assoupli les conditions et le champ de négociations dans les entreprises sans délégués syndicaux (négociations avec des représentants élus du personnel, ou à défaut, avec des salariés mandatés, selon les modalités précisées par la loi).

2- La rôle des branches professionnelles

A l’exception des questions relatives à la durée et à l’aménagement du temps de travail, où leur rôle est moins important, sauf exceptions (notamment en matière de temps partiel où la branche définit la durée minimale à temps partiel, les taux des heures complémentaires, le recours aux avenants temporaires…), on note cependant des missions renforcées pour la Branche.

Tout d’abord, la branche conserve des domaines réservés. Ainsi, un accord d’entreprise ne peut déroger aux garanties définies par accord de Branche concernant : les salaires minima, les classifications, la protection complémentaire, les fonds de la formation professionnelle, auxquels s’ajoutent désormais l’égalité professionnelle entre femmes et hommes, et la pénibilité.

En outre, chaque branche devra ouvrir des négociations, dans les 2 ans à compter de la promulgation de la loi, pour définir l’ordre public conventionnel applicable dans son champ, c’est-à-dire les thèmes sur lesquels les accords d’entreprise ne pourront pas être moins favorables que ceux de la branche (hors cas où la loi définit la primauté de l’accord d’entreprise).

Par ailleurs, la négociation de branche conserve un rôle important dans les branches constituées de TPE/PME (comme dans la branche HPA). Ainsi, un accord de branche pourra contenir, le cas échéant sous forme d’un accord-type indiquant les différents choix laissés à l’employeur, des stipulations spécifiques pour les entreprises de moins de 50 salariés. L’employeur pourra ensuite appliquer cet accord-type à travers un document unilatéral indiquant les stipulations qu’il a retenues, après information des délégués du personnel et des salariés par tous moyens.

Autre mission confiée à la Branche, celle de réguler la concurrence entre les entreprises relevant de son champ d’application.

A noter enfin, que les actuelles commissions paritaires sont transformées en commissions paritaires permanentes de négociation et d’interprétation, qui doivent se réunir au moins 3 fois par an en vue des négociations obligatoires de branche.

Les branches seront restructurées pour passer de 700 à 200 en deux ans.

3- Les divers congés – Congé de maternité

Pour les congés pour événements familiaux, la durée fixée par accord collectif (d’entreprise ou de branche) ne peut être inférieure à celle prévue par la loi, sachant que désormais le congé d’un salarié en cas de décès d’un enfant passe de deux à cinq jours.

En cas de décès du conjoint ou du partenaire Pacs, le congé est désormais fixé à trois jours au lieu de deux. Le congé pour le décès des parents et beaux-parents, d’un frère ou d’une sœur passe d’un à deux jours. Un nouveau congé de deux jours est créé à la survenance d’un handicap chez un enfant. Dans l’HPA, la convention collective de branche ne prévoit pas de dispositions particulières en la matière, ce sont donc les dispositions légales qui s’appliquent, sauf accord collectif d’entreprise plus favorable.

Les congés supplémentaires attribués aux femmes salariées d’au plus 21 ans en cas d’enfant à charge sont étendus aux hommes et aux salariés ayant en charge un enfant en situation de handicap (sans condition d’âge) et vivant au foyer.

Concernant les dispositions relatives à la maternité, rappelons, qu’une salariée, qui reprend le travail à l’issue d’un congé de maternité, bénéficie d’une période de protection, dite « relative », contre la rupture de son contrat de travail, pendant laquelle celui-ci ne peut être rompu que pour faute grave non liée à sa maternité ou sa grossesse, ou en raison d’une impossibilité de maintenir son contrat de travail sans relation avec sa maternité.

Cette période de protection est désormais portée par la loi du 8 août 2016, de 4 à 10 semaines. Elle bénéficie également au père ou au second parent pendant les semaines qui suivent la naissance de l’enfant, qu’il prenne ou non le congé de naissance et le congé paternité.

A noter, que si la salariée prend des congés payés immédiatement après son congé de maternité, le point de départ de cette période de protection, dite « relative », est reporté à l’expiration des congés payés (date de reprise effective de son travail).

4- Les Accords de préservation et de développement de l’emploi

Les entreprises pourront ajuster leur organisation pour « préserver ou développer l’emploi ».

L’accord majoritaire signé primera sur le contrat de travail, y compris en matière de rémunération et de durée du travail. La rémunération mensuelle du salarié ne pourra pas toutefois être diminuée, mais des primes pourront, par exemple, être impactées. Les salariés refusant de tels accords s’exposeront à un licenciement dit « sui generis », c’est-à-dire pour « motif spécifique » sur la base de la procédure de licenciement individuel pour motif économique. Ces salariés bénéficieront d’un « parcours d’accompagnement personnalisé », assuré par Pôle Emploi et financé pour l’essentiel par l’État.

5- Le licenciement économique

Les critères justifiant les licenciements économiques sont précisés et différenciés selon la taille des entreprises.

Il pourra y avoir licenciement économique, notamment en cas de « baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires », en comparaison avec la même période de l’année précédente. Ainsi, il faudra que cette baisse soit d’au moins un trimestre pour une entreprise de moins de 11 salariés, deux trimestres consécutifs pour une entreprise de 11 à 49 salariés, trois trimestres pour une entreprise de 50 à 299 salariés, quatre trimestres pour une entreprise de 300 salariés et plus.

Cet encadrement de l’appréciation des difficultés économiques est applicable à compter du 1er décembre 2016.

6- Appui aux TPE/PME en matière de droit du travail – Provision pour risque prud’homal dans les TPE

La loi prévoit la mise en place d’un « service public territorial de l’accès au droit » afin d’aider les entreprises de moins de 300 salariés pour toute question liée au droit du travail.

Rappel : Les branches pourront négocier des accords-types applicables directement par les employeurs de moins de 50 salariés (voir ci-dessus). Dans les entreprises sans syndicats ni représentants élus du personnel, les employeurs pourront négocier et signer des accords avec des salariés mandatés par une ou plusieurs organisations syndicales sur tout sujet pouvant faire l’objet d’un accord. Pour être valides, ces accords doivent être approuvés par les salariés à la majorité.

Par ailleurs, toute entreprise de moins de 10 salariés recrutant un salarié en CDI pourra, dès son embauche, provisionner des fonds pour de potentiels contentieux prud’hommes. La provision sera déductible du résultat imposable.

7- La lutte contre le caractère précaire de l’emploi saisonnier

L’emploi saisonnier est défini dans la loi comme celui « dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ».

En outre, dans les six mois suivant la promulgation de la loi, les partenaires sociaux des branches professionnelles dans lesquelles l’emploi saisonnier est particulièrement développé et qui ne sont pas déjà couvertes par des stipulations conventionnelles en ce sens, devront engager des négociations relatives au contrat de travail à caractère saisonnier afin de définir les modalités de reconduction de ce contrat et de prise en compte de l’ancienneté du salarié. Sous réserve de précisions ultérieures, la branche HPA serait concernée par ces dispositions.

Notons toutefois qu’il existe déjà dans la Convention collective nationale de l’HPA un article 3.2.2, qui définit les conditions de priorité d’emploi d’une saison sur l’autre. La loi précise, qu’à défaut d’accord collectif de branche ou d’entreprise, c’est une ordonnance qui fixera les modalités de reconduction des contrats saisonniers et de prise en compte de l’ancienneté.

A noter : Des droits nouveaux sont prévus pour les saisonniers. Ainsi, la loi du 8 août 2016 prévoit qu’en cas de chômage d’un jour férié, le salarié saisonnier cumulant une ancienneté de 3 mois (contrats successifs ou non dans l’entreprise) ne doit subir aucune perte de salaire. En outre, la loi prévoit, que lorsque l’employeur s’engage à reconduire le contrat la saison suivante, le saisonnier peut bénéficier, pendant son contrat, de période de professionnalisation.

8- La lutte contre le travail illégal

Concernant les prestations impliquant un détachement de personnel, le maître d’ouvrage devra vérifier que chacun des sous-traitants directs ou indirects de ses cocontractants qu’il a agréé, a bien procédé à la déclaration préalable pour les salariés détachés.

Il s’agit donc d’une extension de l’obligation de vérification à l’ensemble de la chaîne de sous-traitance. Par ailleurs, la dématérialisation des déclarations (de l’employeur qui détache du personnel et du maître d’œuvre en cas de déclaration subsidiaire) est généralisée. De nouvelles sanctions sont prévues, notamment la suspension de la réalisation de la prestation, en cas par exemple de défaut de déclaration de détachement subsidiaire dans les 48 heures Enfin, notons qu’en cas d’accident du travail d’un salarié détaché, c’est le maître d’œuvre qui devra déclarer à l’inspection du travail l’accident survenu.

9- Mise en place d’une instance de dialogue social dans les réseaux de franchise

La loi institue l’obligation pour le franchiseur de mettre en place une instance de dialogue, dès lors qu’il s’agit d’un réseau d’exploitants d’au moins 300 salariés en France, liés par un contrat de franchise mentionné à l’article L.330-2 du code de commerce, qui « contient des clauses ayant un effet sur l’organisation du travail et les conditions de travail dans les entreprises franchisées », et sur demande d’au moins 1 organisation syndicale représentative au sein de la branche ou l’une des branches dont relèvent les entreprises du réseau, ou ayant constitué une section syndicale au sein de l’entreprise du réseau.

Si ces conditions sont remplies, le franchiseur devra alors ouvrir une négociation en vue d’un accord portant mise en place de l’instance de dialogue. Cette instance sera composée de représentants des salariés élus, et des franchisés, et présidée par le franchiseur. Le protocole d’accord doit fixer la composition et le nombre de représentants, la durée des mandats, le nombre de réunions annuelles (à défaut, la loi en prévoit deux par an)… L’instance a des attributions et missions définies par la loi et dispose de moyens matériels et financiers. Un décret en Conseil d’État est en attente et doit préciser certaines conditions d’application de la loi.

10- La médecine du travail

La loi supprime le principe de la visite médicale systématique à l’embauche et la remplace par une simple visite d’information et de prévention, exceptés pour les postes présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité.

Dans ce dernier cas, l’examen médical d’aptitude doit être réalisé avant l’embauche et renouvelé périodiquement.

La loi met fin également aux visites médicales périodiques, tous les deux ans. Celles-ci pourront être plus ou moins espacées en fonction des conditions de travail, de l’état de santé du salarié, de son âge, ainsi que des risques professionnels auxquels il est soumis.

A savoir : la loi garantit aux salariés temporaires et aux CDD (dont saisonniers) un suivi médical individuel d’une périodicité équivalente à celle du suivi des salariés en CDI, dans des conditions à préciser par décret en Conseil d’État (en attente).

Par ailleurs, la loi réforme le régime de l’inaptitude en instaurant une présomption d’aptitude à la fin de l’arrêt de travail, en supprimant la deuxième visite médicale pour constater l’inaptitude. En revanche, les obligations de reclassement à la charge de l’employeur demeurent et sont renforcées en cas de constat d’inaptitude suite à un accident ou une maladie non-professionnelle. Désormais, les délégués du personnel (DP) doivent donner leur avis -comme en matière d’inaptitude suite à un accident du travail (AT) ou une maladie professionnelle (MP)- sur les mesures de reclassement envisagées par le médecin du travail. En outre, le médecin du travail doit, quelle que soit l’origine, professionnelle ou non, de l’inaptitude et l’effectif de l’entreprise, présenter des éléments concernant la capacité du salarié à bénéficier d’une formation destinée à lui proposer un poste adapté.

Point important : dès lors que l’employeur a proposé un poste répondant aux conditions légales (adapté aux nouvelles capacités physiques du salarié, avis des DP, respect des prescriptions du médecin du travail), il est réputé avoir satisfait à son obligation de reclassement.

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