Sortir les voitures des emplacements
La création de hameaux locatifs dans les campings a souvent conduit à redessiner les plans, à casser la géométrie traditionnelle et à repenser le lien entre les voitures et les emplacements. Dans d’autres pays d’Europe, la séparation des voitures des emplacements s’affirme aussi comme une tendance forte. Voilà une piste qui reste à explorer, avec prudence, mais qui peut réserver de belles surprises.
La création de hameaux locatifs dans les campings a souvent conduit à redessiner les plans, à casser la géométrie traditionnelle et à repenser le lien entre les voitures et les emplacements. Dans d’autres pays d’Europe, la séparation des voitures des emplacements s’affirme aussi comme une tendance forte. Voilà une piste qui reste à explorer, avec prudence, mais qui peut réserver de belles surprises.
Sommaire
Séparer les voitures des emplacements, un nouveau deal
L’essor du camping est pleinement lié à celui de l’automobile et pour beaucoup d’usagers, leur voiture est le complément naturel de leur caravane ou de leur tente.Ils tiennent à l’avoir sous la main en permanence et l’utilisent même pour le rangement. Cette exigence change totalement avec la clientèle des hébergements locatifs.
Pour eux,la voiture ne sert plus de réserve ou de radio, mais simplement de moyen de déplacement pour quitter le camping. C’est pourquoi les gestionnaires de terrains, qui modifient le plan de leur camping à l’occasion de l’implantation d’unités locatives, saisissent parfois l’occasion de créer un nouveau paysage en regroupant les voitures sur un parking et en les écartant du regard. Les mobile-homes et les chalets sont mieux insérés dans la végétation. Le cadre y gagne.
Plus de sécurité sans la voiture
Cette volonté de séparer les voitures, qui est relativement nouvelle en France, est déjà bien connue dans certains pays, et notamment aux Pays-Bas, y compris pour les emplacements nus. Aux Pays-Bas, on trouve beaucoup de campings qui ont fait le choix d’un secteur sans voitures et les brochures publicitaires présentent souvent des photos excluant toute auto. Le vacancier vient avec son véhicule lors de l’installation pour placer sa caravane ou monter sa tente et décharger ses affaires. Ensuite, il va garer sa voiture sur un parking un peu plus loin. Les usagers apprécient tout particulièrementlaplus grande sécurité dont bénéficient les enfants qui peuvent courir sans crainte. Au camping néerlandais Ter Spegelt, à Eersel, une partie du camping est divisée en petits îlots d’une dizaine ou d’une quinzaine d’emplacements desservis par une allée centrale. Les voitures n’accèdent que pour l’arrivée et le départ.
Cette logique est renforcée par un placement conseillé des familles dans les différents secteurs en fonction de l’âge des enfants. On recommande aux parents avec des enfants de moins de six ans de réserver dans un secteur, à ceux dont les enfants ont entre six et dix ans dans un autre secteur, et ainsi de suite. Au-delà de cet avantage d’une plus grande sécurité, on apprécie également la sensation d’un espace plus grand et plus naturel. On perd totalement l’impression d’être installé au bord de la route et on se sent plutôt au milieu d’une pelouse.
Une tendance forte en Autriche et en Italie
En Autriche comme en Italie, plusieurs campings proposent depuis longtemps des secteurs sans voitures pour les emplacements nus.
Si la tendance est marquée dans certains pays d’Europe, c’est parfois pour des raisons d’adaptation, au relief ou aux aleas. A Nenzing en Autriche, c’est ainsi parce que les emplacements sont taillés en terrasses avec un accès qui n’est pas idéal à pratiquer quotidiennement. De plus, la surface de ces emplacements-là est plus petite que celle des autres emplacements du terrain. Si le coup d’œil y gagne nettement et si les habitués sont séduits par la formule, elle compte aussi ses détracteurs. On retrouve des opposants vigoureux sur les forums de campeurs allemands !
En Italie, les premiers campings à avoir séparé les voitures des emplacements étaient les campings de la côte toscane où les autorités craignaient tout particulièrement les incendies, et il avait été jugé plus prudent d’écarter les automobiles du secteur côtier le plus sensible. Dans d’autres terrains, le secteur proche de la plage se voit privé de voitures, parce qu’il est le plus demandé et qu’on y laisse des emplacements plus petits. Ce qui le rend également plus plaisant à l’œil pour tous les usagers qui viennent à pied à la plage depuis le fond du camping. Tout près de Venise, c’est le camping Jesolo International, un des terrains jugés les meilleurs en Europe par tous les spécialistes, qui, dans le cadre d’une restructuration partielle et de l’installation d’hébergements locatifs, conduite par l’architecte Robert Bezdikian, un spécialiste de l’hôtellerie de plein air, a choisi de regrouper les voitures sur de petites aires de stationnement. Un principe qui se retrouve également à petite échelle chez ses voisins d’Union Lido ou d’Enzo pour les nouveaux secteurs locatifs. Au Jesolo,la mise à l’écart des voitures va de pair avec une logique de communication qui met l’accent sur l’écologie. Le camping est certifié Eco camping et « ami du climat » avec un bilan très réduit d’émissions de gaz à effet de serre.
En France, une nouvelle organisation
Pour ce qui concerne les emplacements sans voiture, La France n’est pas en reste, même si, pour une fois, ce n’est pas elle qui donne le ton.
Rappelons que dans les normes de classement une place de parking séparée de l’emplacement, mais nominativement attribuée au locataire de l’emplacement avec un numéro, peut être ajoutée à la surface de l’emplacement. Car si les campings néerlandais, autrichiens ou italiens peuvent plus facilement séparer les voitures des emplacements, c’est aussi parce qu’ils ne sont pas dans la même logique normative d’emplacements délimités et individualisés avec des surfaces minimales. En Vénétie, les petits emplacements de 50 ou 60 mètres carrés pour les randonneurs sans voiture sont autorisés dès lors qu’ils sont compensés par de plus grands emplacements, et surtout que le ratio global de la surface du camping et de sa capacité d’accueil totale est maintenu à un certain seuil. Cela donne davantage de souplesse pour s’adapter à toutes les situations.
Le « tout nature »
Danslalogique du « tout nature » qui se confirme dans le monde du camping, on peut penser que les quelques exemples actuels seront appelés à se multiplier. Chez Huttopia, c’est très logiquement que l’on a fait à Dieulefit, danslaDrôme, un camping où les voitures sont reléguées au parking, une fois le déchargement effectué. Il en ressort une image très différente de celle du camping au découpage géométrique habituel et le vacancier se sent beaucoup plus en pleine nature lorsque l’automobile sort de son cadre de vie immédiat. La chaîne qui veut « retrouver les valeurs originelles du camping » explique que dans tous ses terrains,lacirculation des véhicules est limitée danslamesure des possibilités de chaque site.
Aujourd’hui, tous ceux qui créent un nouveau terrain de camping, agrandissent un site existant ou procèdent à une restructuration, doivent sérieusement se poser la question de la séparation des voitures des emplacements. Certes, la pratique est loin de séduire tous les clients, mais elle présente de réels avantages pour donner plus d’espace, de sécurité et de personnalité à chaque site. C’est également un moyen de faire un camping pas comme les autres. Ce qui est bon en termes paysager, mais aussi commerciaux.
« Un confort supplémentaire »
Pour Jean-Christophe Quéré, gestionnaire du Flower le Cabellou à Concarneau, Finistère, la séparation des voitures des emplacements locatifs est d’abord un confort supplémentaire : « J’ai fait trois villages de huit, dix et douze mobile-homes avec des parkings séparés. Les voitures sont à 50 mètres des locatifs. Pour les clients, c’est plus confortable car il y a moins de bruit, davantage de sécurité pour les enfants, et ils retrouvent plus de convivialité entre eux. Sur le court cheminement piétonnier qui va du parking aux mobile-homes, ils sont plus enclins à se parler, car il y a moins de précipitation à aller chercher la voiture. »