Signalétique et enseignes : les règles changent
La mise en place des règles du Grenelle de l’environnement vient restreindre l’usage de la publicité sur le bord des routes sous ses différentes formes. Les campings ont longtemps bénéficié d’une dérogation tacite qui n’est plus d’actualité, ce qui oblige à repenser signalisation et publicité routière de façon globale.
La mise en place des règles du Grenelle de l’environnement vient restreindre l’usage de la publicité sur le bord des routes sous ses différentes formes. Les campings ont longtemps bénéficié d’une dérogation tacite qui n’est plus d’actualité, ce qui oblige à repenser signalisation et publicité routière de façon globale.
Sommaire
Une tolérance qui s’éteint
Malgré la généralisation de la navigation GPS, la publicité routière des campings reste utile. Mais soumise à des contraintes réglementaires
Tous les gestionnaires de camping sont confrontés à la nécessité de mieux faire connaître leur existence et de faciliter l’arrivée de leurs clients. Assurément c’est très largement en amont et notamment via internet que s’effectue la publicité. La localisation des terrains grâce aux systèmes de navigation GPS est aussi de plus en plus utilisée par les clients. Et pourtant la signalisation routière, tout comme la publicité visible depuis les routes dans certains cas, reste indispensable. Bien des gestionnaires de campings font remarquer en souriant que depuis le recours au GPS qui devrait faciliter les choses, paradoxalement ils n’ont jamais vu autant de clients peiner à les trouver ou se tromper sur leur route d’accès. Les erreurs de saisie, les homonymies entre lieux dits, les confusions entre communes voisines sont autant de sources d’erreur. On cite des exemples où des clients se sont trompés de plusieurs centaines de kilomètres en suivant aveuglément leur GPS, mais après avoir fait une erreur de programmation. Le GPS rend les clients de plus en plus dépendants et ils ont de moins en moins souvent une carte routière dans leur véhicule. Ce qui nécessite justement une bonne signalétique en bord de route.
Rendre son camping facilement accessible à ceux qui le cherchent, et visible aussi par ceux qui n’en connaissent pas nécessairement l’existence, sont les deux objectifs de la signalisation et de la publicité routières. Reste à bien connaître les contraintes règlementaires qui, là aussi, se sont singulièrement alourdies ces dernières années. Pendant longtemps on se préoccupait simplement de trouver un emplacement bien situé sur terrain privé et d’obtenir l’accord du propriétaire pour installer un panneau aux couleurs du camping avec si possible une information directionnelle. On savait qu’en dessous d’une surface d’1,5 mètre carré on n’entrait pas dans le régime des publicités soumises à déclaration et imposition. Dans les faits une assez grande tolérance s’était développée. Elle n’est plus de mise aujourd’hui, même si les vieilles habitudes perdurent.
Publicité ou pré-enseigne
Les terrains de camping sont concernés principalement par le régime dit des enseignes et pré-enseignes. Le recours à de grands panneaux publicitaires via des sociétés d’affichage ne concerne la profession que de façon très marginale et pour de rares établissements.
Les pré-enseignes destinées à annoncer le camping sont installées sur le domaine privé, à la différence des panneaux de signalisation routière, placés sur le domaine public de l’emprise routière et dépendant donc directement des collectivités territoriales en charge des routes et de la signalétique routière. Les pré-enseignes n’étaient pas soumises au régime général de la publicité et bénéficiaient d’un régime dérogatoire dès lors qu’elles apportaientune information particulièrement utile aux personnes en déplacement. Le camping n’a jamais été cité précisément parmi les activités utiles aux personnes en déplacement, mais tacitement il bénéficiait d’une sorte d’extension du champ de ces activités jugées utiles. Dans un premier temps ce régime dérogatoire concernant le camping a été remis en cause et surtout, depuis le Grenelle de l’environnement qui a totalement refondé les textes concernant la publicité et l’affichage, ce régime dérogatoire ne peut plus s’appliquer aux terrains de camping. Il ne concernera à l’avenir que les produits du terroir ou les sites à vocation culturelle qui pourront placer un maximum de deux pré-enseignes.
La loi du 12 juillet 2010 complétée par le décret du 30 janvier 2012 avait accordé un délai de tolérance jusqu’en 2015 pour le régime dérogatoire des pré-enseignes. La loi du 22 mars 2012, dite loi Warsman 2, prise pour la simplification du droit et des démarches administratives a consacré un article à cette question (article 67 de la loi 2012-387) et prévoit un délai de 6 ans et non plus de 2 ans pour la mise en conformité.
Cependant la même loi dit qu’un décret peut réduire ce délai à une durée comprise entre deux et six ans pour les pré-enseignes. A ce jour un tel décret n’a pas été publié et le délai annoncé de juillet 2015 est donc prorogé. Mais rappelons qu’une interprétation stricte des textes ne permet pas aux campings de bénéficier de ce régime dérogatoire des pré-enseignes. C’est pourquoi lorsque des associations de défense de l’environnement poursuivent l’Etat, elles obtiennent gain de cause. Le préfet exige alors le retrait des panneaux concernés et peut même imposer une astreinte de 200 euros par jour et par publicité, 15 jours après la notification de l’arrêté si la pré-enseigne est maintenue. Ce qui signifie clairement que le recours à des pré-enseignes est condamné à terme pour le camping et reste même soumis à d’éventuelles interdictions dès maintenant.
Les enseignes d’entrée concernées aussi
Si pour les pré-enseignes et les publicités la prorogation de deux à six ans de la période transitoire n’est pas garantie, elle semble en revanche confirmée pour l’application des nouvelles règles relatives aux enseignes.
Les textes règlementaires parlent d’enseignes pour les panneaux qui sont placés directement à l’entrée des établissements. Car là aussi la loi vient imposer des règles, bien que l’on soit sur sa propre emprise foncière. En agglomération les enseignes ne devront plus excéder une surface de 16 mètres carrés, tandis qu’hors agglomération cette surface est limitée à 6 mètres carrés. Qui plus est, tout en tenant compte de ces surfaces, la hauteur ne peut pas dépasser 5 mètres avec une largeur supérieure à 1 mètre ou bien 8 mètres si la largeur est inférieure à 1 mètre.
La règlementation est encore plus sévère pour les publicités qui ne sont pas de simples enseignes. Ainsi les dispositifs publicitaires scellés au sol sont tout simplement interdits dans les communes de moins de 10 000 habitants, sauf si elles font partie d’une agglomération de plus de 100 000 habitants. Autant dire qu’aucun camping ne pourra plus guère envisager d’avoir recours à de telles publicités.
Face à ces nouvelles contraintes la situation varie beaucoup entre les localités qui ont mis en place un vrai plan de signalisation et les autres. La situation de campings situés sur une commune différente de celle couverte par la route d’accès, voire en limite de départements reste souvent insoluble sans recours aux pré-enseignes. Sur les grands axes, les campings accessibles par une route adjacente sont aussi pénalisés de ne pouvoir bénéficier d’un fléchage routier qu’au carrefour les concernant. Les nouvelles règles ne pourront être comprises que si elles s’accompagnent d’une vraie politique globale de signalisation routière mettant tous les campings à égalité, quelle que soit leur situation.
Les règlements locaux
Au-delà de la règlementation nationale qui devient plus sévère, les campings peuvent aussi être soumis à des règles locales strictes.
Les élus locaux ont la possibilité d’adopter un règlement local de publicité. Celui-ci ne peut pas être plus tolérant que les règles nationales et dans les faits ces règlements locaux sont l’occasion d’imposer un régime encore beaucoup plus strict. Les règlements locaux de publicité (RLP) sont élaborés ou modifiés conformément à la procédure applicable pour les plans locaux d’urbanisme (PLU, art. R.581-72). Elaborés à l’initiative du maire ou du président de l’EPCI compétent, ils sont annexés au PLU une fois approuvés. Le RLP, qui a vocation à préciser les règles en fonction du contexte urbain local et de la localisation des dispositifs publicitaires envisagés, prescrit notamment, à l’intérieur de zones qu’il délimite, des règles de densité et d’harmonisation pour les publicités. Un document graphique des zones ainsi instituées l’accompagne. Le RLP édicte également des règles concernant les nuisances lumineuses et la limitation des consommations d’énergie. Dès lors qu’un RLP a été élaboré, la police de l’affichage relève de la compétence du maire au nom de la commune. Si tel n’est pas le cas, ou en cas de carence du maire dans l’exercice de ses pouvoirs, le préfet sera l’autorité compétente en la matière (art. R.581-82).
Au fur et à mesure des révisions des documents locaux d’urbanisme et avec l’influence grandissante des défenseurs de l’environnement et du paysage, on peut s’attendre à voir ces règlements locaux se multiplier et donc restreindre encore les possibilités de pré-enseignes en marge du réseau routier.
Les gestionnaires du Lot
Dans le Lot les gestionnaires de camping sont nombreux à avoir été confrontés dès 2011 à une application stricte des textes avec une demande de retrait des pré-enseignes des campings et une astreinte de 200 € par jour si le retrait n’est pas effectif.
Le préfet du Lot a appliqué cette règle sévère car l’Etat avait été poursuivi au tribunal administratif par l’association « Paysages de France » pour non respect des règles en matière de publicité et pré-enseignes. « Le nouveau préfet, arrivé en juillet 2012, se préoccupe plus des zones inondables que de l’affichage et des pré-enseignes », explique Christian Moncoutie, président du syndicat départemental de l’hôtellerie de plein air. Mais il ajoute : « Ce qui pose aussi problème, c’est qu’on n’arrive pas à mettre en place un vrai système de signalisation à l’échelle du département. Un technicien au service des collectivités locales avait été embauché, mais on n’a plus de nouvelles. Les communautés de communes sont préoccupées par le prochain redécoupage territorial, tandis que d’autres élus confondent la problématique urbaine et celle du monde rural. On a demandé à être associés à ce qui sera proposé, mais on ne nous invite pas ou bien il n’y a pas de réunions. Et bien sûr dans le périmètre du parc régional des Causses du Quercy qui couvre un tiers du département c’est encore plus compliqué. »
« Dans nos régions les pré-enseignes sont vitales »
Christian Graffeuil, gestionnaire du Soleil d’Oc en Corrèze et président de la fédération limousine de l’hôtellerie de plein air confirme l’utilité des pré-enseignes : « Dans nos régions elles sont vitales pour les terrains situés un peu à l’écart, même si les clients utilisent de plus en plus le GPS. C’est un service que l’on doit à nos clients quand le cheminement est compliqué avec beaucoup de redirections. Pour ma part je partage la même pré-enseigne avec un collègue qui est dans la même direction. C’est un bon moyen d’éviter de multiplier les panneaux tout en aidant les clients à nous trouver. »