Les salaires dans l’HPA

Par Stéphane Messer 01/04/2015

Parmi les chiffres qui traduisent le poids économique de l’hôtellerie de plein air française, on évoque souvent, et logiquement les quelque 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. On sait moins que la filière emploie aujourd’hui plus de 36 000 salariés, permanents et saisonniers, dans une grande variété de métiers. Petit point sur les rémunérations dans le camping.

Parmi les chiffres qui traduisent le poids économique de l’hôtellerie de plein air française, on évoque souvent, et logiquement les quelque 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires. On sait moins que la filière emploie aujourd’hui plus de 36 000 salariés, permanents et saisonniers, dans une grande variété de métiers. Petit point sur les rémunérations dans le camping.

Une profession particulière

La vérité sur les rémunérations dans le secteur de l’hôtellerie de plein air ? Il serait aisé d’y répondre dans un pays qui ferait de la « transparence » une vertu cardinale partagée par toutes et tous. Rien de tout cela en France, où parler de sa rémunération, même à un collègue de travail, reste un sujet tabou.

 Il faut reconnaître aussi qu’il n’est pas facile de récolter des informations, d’ordre général, dans un secteur où les entreprises familiales indépendantes de tout groupe intégré sont largement majoritaires (plus de 95 %) et où 70 % des dirigeants sont des travailleurs non-salariés (TNS). Pas aisé non plus d’envisager cette profession dans sa globalité lorsque l’on en connaît sa diversité : rien à voir entre les chiffres d’affaires d’un gros camping du littoral méditerranéen et d’un établissement de taille modeste dans les terres. Il en va de même pour les rémunérations des dirigeants dont certains se trouvent, à titre personnel, dans une phase de remboursements de leurs emprunts, alors que d’autres en sont d’ores et déjà libérés, ce qui ne manque pas d’influer sur leurs revenus.

Concernant la rémunération des salariés, la tâche est nettement plus simple. En croisant les données récoltées sur les sites d’annonces, les informations fournies aimablement par les uns et les autres, nous avons pu établir des fourchettes de rémunérations assez précises, métier par métier. Nous vous invitons à vous y reporter. « Globalement, le niveau des salaires dans l’hôtellerie de plein air est correct, admet Hubert Parent, vice-président de la FNHPA en charge des dossiers sociaux. Nous avons beaucoup de groupes de travail, des réunions régulières avec les organisations syndicales au sein de la Commission mixte paritaire. Nous travaillons dans un esprit d’écoute et de recherche d’un consensus. Le dernier accord du 22 mai 2014 relatif au travail à temps partiel, et qui permet de déroger de façon conventionnelle à la durée minimale de 24 heures par semaine, en est un bon exemple ! Au même titre que le CDI Emploi-Formation.»

63 % des permanents à plus de 1 600 €

C’est une radiographie complète de l’hôtellerie de plein air que propose le rapport de Branche 2012 (*), élaboré par le cabinet Ambroise Bouteille et Associés à la demande de la Commission paritaire nationale de l’emploi et de la formation professionnelle (CPNEFP). Ce document de plus de 100 pages fait notamment un focus sur les rémunérations des salariés permanents et des saisonniers.

Il ressort de ce rapport que 81 % d’entre eux ont un salaire mensuel brut compris entre 1 200 et 2 400 €, mais aussi que plus de 60 % d’entre eux perçoivent une rémunération brute mensuelle supérieure à 1 600 €. En optant pour une approche plus fine, on découvre que:

  •  27 % ont une rémunération comprise entre 1 200 et 1 599 €,
  •  38 % ont une rémunération comprise entre 1 600 à 1 999 €,
  •  16 % ont une rémunération comprise entre 2 000 et 2 399 €,
  •  6 % ont une rémunération comprise entre 2 400 et 2 799 €
  •  3 % ont une rémunération de 2 800 € et plus.

 Le rapport montre par ailleurs que « le salaire horaire brut est en moyenne plus élevé pour les salariés permanents exerçant des activités d’administration (13,90 €), d’animation (12,30 €) et d’accueil/vente (11,60 €). Il est en revanche plus bas pour les salariés permanents exerçant des activités de sécurité/gardiennage (10,30 €) et de ménage (10,20 €).

 Les saisonniers moins bien lotis

 S’ils constituent une majorité en nombre d’employés salariés  des campings (plus des trois quarts), les personnels saisonniers héritent d’un niveau de rémunération globalement plus bas que celui des permanents. Pour 81 % des saisonniers, le niveau de salaire est en effet inférieur à 1 600 €. Dans le détail, on constate que si 61 % des saisonniers ont un salaire brut compris entre 1 200 et 1 599 €, 20 % perçoivent moins de 1 200 €. Complétant le panel de cette catégorie, 19 % des saisonniers bénéficient d’un salaire brut supérieur à 1 600 €. Par ailleurs, 73 % d’entre eux ont un salaire horaire inférieur à 10 €.

 (*) Questionnaire envoyé à 4 160 établissements. Près de 30 % des établissements y ont répondu, donnant ainsi des informations sur 3 201 salariés (1 137 salariés permanents et 2 064 salariés saisonniers. Rapport final le 29 septembre 2013.

Le cas à part du Directeur salarié

La structuration du marché des campings, avec la constitution de chaînes, et plus encore de groupes intégrés, a fait naître un nouveau métier, celui de directeur salarié. Jusqu’alors, on ne voyait le patron d’un camping qu’à travers son propriétaire ; depuis une vingtaine d’années, et l’émergence de groupes intégrés, les gestionnaires de ces groupes placent à la tête de leurs campings des directeurs aux mêmes fonctions que celles des gestionnaires propriétaires.

L’occasion pour nous de rappeler ce que représente cette fonction tellement multiple, qui fait du patron de camping un patron de PME, mais aussi, selon l’importance du camping, le responsable « civil» d’une petite ville. S’ajoutant aux spécificités de la tâche, le caractère saisonnier de l’activité rend encore plus importante la sélection des directeurs de site, pour les responsables de groupes, afin d’éviter le turn-over des candidats, et d’assurer au contraire une pérennité du dirigeant à la tête du camping.

«Directeur de camping, assurément un poste clé », déclare Pierre Houé, P.-D.G. du groupe FranceLoc et, de ce fait, à la tête de soixante-sept campings. « Il faut avoir des compétences techniques, commerciales, administratives, et de management…, bref, c’est un métier compliqué.» Un vrai poste stratégique, avec une charge de travail très intense pendant la saison, loin de l’image renvoyée par la série TV Camping Paradis. Nous favorisons le recrutement de couples avec des rémunérations brutes annuelles de 80 000 à 90 000 € (pour le couple). Nos directeurs sont logés, ce qui représente un équivalent salaire brut mensuel de 1 500/1 600 €. Parmi les avantages, il faut également compter la mutuelle d’entreprise et une réduction, voire la gratuité, lors de séjours hors vacances scolaires, sur un site FranceLoc. »

 Jean-François Barral, DRH d’Huttopia/Indigo (trente-deux campings), précise pour sa part : « Cette catégorie de salariés bénéficie d’un salaire fixe, mais aussi d’un variable qui représente entre 0 à 1,2 mois de salaire (ce variable se compose d’une prime de performance et d’un accord d’intéressement), d’un véhicule de service, en plus du logement de service.»

La rémunération d’un directeur salarié de camping dépend de son expérience, de son ancienneté et du dimensionnement de l’établissement. Après recoupement, nous en sommes arrivés aux fourchettes de rémunérations suivantes:

  •  directeur d’établissement (jusqu’à 200 emplacements): de 2 050 à 2 500 € bruts/mois.
  •  directeur d’établissement (de 201 à 400 emplacements) : de 2 200 à 3 200 € bruts/mois.
  •  directeur d’établissement (401 emplacements et plus): de 2 300 à 3 600 € bruts/mois.

 

 

métier par métier, les salaires dans le camping

Voici nos estimations de rémunérations moyennes, poste par poste, pour l’essentiel des métiers exercés dans le camping. Bon à savoir, entre 2006 et 2015, les salaires dans le secteur ont progressé plus vite (+ 15 %) que l’inflation (+ 13%). Un détail non négligeable pour les salariés.

  •  Personnel d’accueil, sans tâche administrative
      • (coefficient 100-105),           entre 1 460 et 1 830 € bruts/mois. 
  • Hommes et femmes toutes mains et surveillant de jour
      • (coefficient 105-115),           entre 1 460 et 1 830 € bruts/mois. 
  • Employés non qualifiés employés à l’activité bar, restauration et commerce. Personnel d’accueil
      • (coefficient 105-120),           entre 1 460 et 1 830 € bruts/mois. 
  • Surveillant de baignade
      • (coefficient 110-135),           autour de 1 550 € bruts/mois. 
  • Employé(e) administrative
      • (coefficient 120-150),           autour de 1 550 € bruts/mois. 
  • Personnel d’accueil minimum trilingue
      • (coefficient 135-170),           entre 1 600 et 2 000 € bruts/mois. 
  • Animation
      • (coefficient 130- 170),         entre 1 600 et 1 800 € bruts/mois.
  • Employé (e) qualifié(e) affecté(e) à l’activité bar-restauration et commerces annexes
      • (coefficient 120-150)          autour de 1 500 € bruts/mois. 
  • Ouvrier d’entretien qualifié
      • (coefficient130-150),           entre 1 600 et 2 500 € bruts/mois. 
  • Cuisinier
      • (coefficient 130-150),          entre 1 600 et 1 900 € bruts/mois. 
  • Maître-nageur, plagiste
      • (coefficient 135-170),          autour de 1 600 € bruts/mois. 
  • Cadre débutant
      • (coefficient 200 à 220),        entre 1 950 et 2 200 € bruts/mois. 
  • Cadre confirmé
      • (coefficient 220-250),          entre 2 000 et 2 500 € bruts/mois. 
  • Cadre directeur d’établissement (jusqu’à 200 emplacements)
      • (coefficient 225-250),          entre 2 050 et 2 500 € bruts/mois. 
  • Cadre directeur d’établissement (201 à 400 emplacements)
      • (coefficient 250-275),          entre 2 200 et 3 170 € bruts/mois. 
  • Cadre directeur d’établissement (401 emplacements et plus)
      • (coefficient 275-300),          entre 2 300 et 3 580 € bruts/mois.

Les salaires des autres professions

A titre de comparaison, voici les salaires d’une quinzaine de professions en France 

Smic mensuel brut     :                           1 457,52 €

(base 151,67 heures)

Smic horaire:                                           9,61 € 

 

Salaires mensuels bruts moyens (source Insee)

 Technicien de surface :       1 743 €

Gardien de la paix :            1 760 €

Agent de sécurité :             1 932 €

Animateur culturel :           2 016 €

Agriculteur :                      2 198 €

Pompier :                          1 957 €

Eboueur :                          2 072 €

Secrétaire de direction :      2 125 €

Conducteur (poids lourd) :  2 065 €

Professeur des écoles :       2 885 €

Conducteur (métro, train) :3 542 €

Infirmier (salarié) :            2 869 €

Médecin hospitalier :          5 833 €

Zoom sur la région Midi-Pyrénées: instructif!

L’enquête menée à l’automne 2014 sur les ratios de gestion des campings de Midi-Pyrénées (*) livre des données très intéressantes, notamment sur les revenus des « propriétaires », ayant pour la plupart le statut de Travailleur non salarié (TNS).

L’investigation révèle que leur rémunération brute mensuelle moyenne est de 1 469 €, soit à quelques euros près, juste au-dessus du Smic ! Elle monte à 1 818 € brut pour les propriétaires de campings quatre étoiles (138 emplacements en moyenne) et tombe à 1 177 € brut pour des propriétaires de campings affichant trois étoiles (114 emplacements en moyenne). Dans tous les cas, on reste très loin du salaire médian en France livré par l’Insee et qui était de 2 223 € brut en 2011 !

 Pour Pascaline Martinez (camping Les Pins, quatre étoiles, à Payrac, dans le Lot) qui a « piloté » l’enquête, les chiffres sont édifiants. Et, c’est peut-être le plus inquiétant : « Ils ne risquent pas de s’améliorer. Ma rémunération –2 200 € brut- n’a pas bougé depuis dix ans, explique-t-elle. On nous dit parfois, vous vous rattraperez lorsque vous vendrez ! Mais les perspectives ne sont pas bonnes: en France, les classes moyennes, notre clientèle, trinquent, et les marges de nos campings baissent ! »

C’est un secteur d’activités où les propriétaires « travaillent énormément, prennent beaucoup de risques et se payent peu », synthétise Christian Lagarde, de Campus Avenue.

Un choix pleinement assumé par Claude Bordeaux qui, après une carrière de cadre à l’international, a racheté en 2009 un camping deux étoiles à Rocamadour, dans le Lot. « Nous avons tout misé dans ce projet ma femme et moi. Toutes nos économies y sont passées. » Quelques années plus tard, et quelque 1,6 M€ mis dans le projet, le camping Padimadour affiche quatre étoiles et pour son propriétaire, c’est « que du bonheur ! Même sans vacances, ni salaire depuis 2010 ! »

 Le cas de Claude Bordeaux n’est pas unique. « Nous connaissons tous des propriétaires qui se nourrissent sur la bête », précise Pascaline Martinez. Il ne faut pas que cela dure trop longtemps.

 (*) Sur les 400 campings adhérents de la FNHPA, 50 ont répondu aux questions et principalement des campings trois et quatre étoiles.

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